Pandémie et changements climatiques : est-ce qu’on avance?


 Publié le 12 juillet 2020
Pandémie et changements climatiques

La réponse est oui, définitivement.

Quand la pandémie s’est invitée sur la planète, la pollution s’est mise sur pause en même temps que l’économie. En consultant les journaux et magazines d’ici et ailleurs – je suis un grand consommateur de ces choses-là, malgré mon jeune âge -, on réalise que les émissions de certains polluants ont chuté drastiquement.

En Chine, par exemple, les émissions de gaz carbonique (CO2) ont chuté de 25%. L’Italie aurait vu ses émissions de dioxydes d’azote (NO2), provenant principalement du trafic routier, baisser de plus de 50%. À New York la pollution atmosphérique a reculé de 30%. Tandis qu’à Delhi, elle aurait chuté de 60%,

On a pu voir aussi, sur les réseaux sociaux – mon oncle Bertrand trouve que je passe trop de temps là-dessus -, que les eaux du grand canal de Venise étaient redevenues limpides. J’ai même vu une publication où l’on disait que les dauphins seraient revenus dans un port de Sardaigne. (Ma mère pense que c’est un photomontage. Il ne faut pas s’en faire, elle pense toujours que tout est truqué de toute façon.)

Plus de pollution = plus de décès

J’ai même trouvé des liens vers des recherches qui font le lien entre les décès et le niveau de pollution de l’air, comme cette étude de l’Université Martin Luther de Halle-Wittenberg en Allemagne, rapportée dans les Notes de la Colline de la Bibliothèque du Parlement, précisant que 78% des décès dus à la Covid-19 en Italie, en France, en Espagne et en Allemagne sont survenus dans les régions où la pollution atmosphérique était la plus forte.

Futura-Sciences, de son côté, est allée jusqu’à affirmer que la pollution en Chine avait tellement diminué que l’épidémie avait « paradoxalement épargné plus de vies que les décès qu’elle a provoqués ». Car la pollution en Chine ferait chaque année, 1,1 million de victimes.

Je suis même tombé sur un entretien avec Hubert Reeves, dans Le Parisien, où il affirmait (en 2016) que la plupart des enfants chinois n’avaient jamais vu un ciel étoilé. Rassurez-vous Monsieur Reeves, peut-être qu’en ces temps de pandémie, les petits Chinois ont enfin pu assister au grand spectacle que produit le ciel, la nuit…

C’est malade tout ce que l’on peut trouver quand on s’en donne la peine. (Ma blonde dirait « surtout quand on a du temps à perdre. » Mais passons.) Non content de mes trouvailles – et confinement oblige -, j’ai décidé de voir si c’était la même chose chez nous; si la Covid-19 avait aussi un impact sur la qualité de l’air du Québec.

Et la réponse est oui. Même s’il s’agit de résultats préliminaires, ils sont plus que probants. Durant la première phase de la pandémie, tous les polluants associés au transport routier ont subi une diminution allant de 35% à 80%. Et c’était vrai autant à Montréal, Laval ou Brossard, qu’à Québec ou Gatineau.

Concentrations de dioxyde d’azote

Les concentrations de dioxyde d’azote (NO2) auraient diminué de moitié à compter du 9 mars.

Conclusion? La réponse est la même partout. La pandémie a donné du mal à l’humanité tout entière, mais elle a fait tellement de bien à la planète.

Et si Donald Trump voulait poursuivre la Chine pour avoir mis à mal l’économie américaine, Greta Thunberg, elle, aurait dû écrire une lettre de remerciement aux Chinois de Wuhan pour avoir, sans le vouloir, fait autant de bien à la planète en si peu de temps. (Ma mère trouve que c’est une joke plate. Mais, à sa défense, le sens de l’humour n’a jamais été sa plus grande force.)

Une série de constats et une grande question…

Quand on aime chercher des réponses, on se pose obligatoirement beaucoup de questions. Et l’une de ces questions m’est apparue un bon matin, en promenant Kiki, le petit chien (Yorkshire) de madame Dubreuil, ma voisine de 87 ans. (Madame Dubreuil n’ose pas encore se déconfiner. C’est sa petite-fille qui fait ses commissions une fois par semaine. Et c’est moi qui sors son chien deux fois par jour. C’est ma façon d’être utile, et ma blonde trouve que ça me fait du bien de prendre un peu d’air.)

En fait, c’est une série de constats que j’ai faits et qui m’ont mené à une question fondamentale.

Le premier constat que j’ai fait, c’est qu’on aime ça, nous, les Québécois, critiquer. On est sur le bord d’être chialeux, comme dirait mon oncle Bertrand. Ce n’est jamais assez ci ou jamais assez ça.

Le deuxième constat, c’est qu’on met souvent ça sur le dos des autres. C’est la faute du gouvernement, des riches, du voisin, du concurrent, du partenaire, du professeur, des parents, des enfants, du patron, du syndicat… mais rarement de notre faute à nous. Les autres ont le dos large (sauf les syndicats, mais ça, c’est une autre histoire…). Et nous, pas tant que ça. On aime la critique, mais on n’aime pas être critiqué.

Alors j’ai décidé de pousser plus loin ma recherche, et d’aller voir si la pandémie avait mis aussi sur pause tous les efforts qui doivent être déployés pour le climat.

Et cela vient d’un troisième constat. L’enjeu des changements climatiques est tellement grand qu’on a l’impression que c’est au gouvernement de prendre les commandes et de tracer la voie; parce que la part de chacun est bien peu de choses dans la balance.

Qui dit vrai?

J’ai fouillé et fouillé pour savoir si le Québec se classe bien ou pas, en matière de changement climatique, en Amérique du Nord et dans le monde. En Amérique du Nord, c’est facile, le Québec est au premier rang des états qui émettent le moins de GES. Et il est classé 7e au monde selon le Conference Board, juste devant la Norvège. Alors que le Canada est à la traîne selon le German Watch, et viendrait au 54e rang mondial, sans doute à cause du pétrole des sables bitumineux.

Les gens derrière le Pacte pour la transition disent qu’on n’est pas très bon, et d’autres disent que « le Québec est loin d’être un cancre ». Pourtant les chiffres ne mentent pas. Le Québec est le meilleur élève des 10 provinces canadiennes et des 50 états américains.

Le seul point sur lequel tout le monde s’entend toutefois, c’est sur l’importance de prendre soin de notre environnement. Oui, tout le monde est du même avis :  gouvernements, riches, voisins, concurrents, partenaires, professeurs, parents, enfants, patrons, syndicats. C’est déjà un bon début.

Alors n’écoutant que mon courage (et au grand désespoir de ma blonde qui m’a malicieusement menacé d’en profiter pour s’inscrire sur un site de rencontres), j’ai décidé d’aller voir tout ce que le gouvernement avait mis en branle depuis la dernière élection.

Et là, autant le dire tout de suite, j’ai été surpris. Agréablement surpris de voir tout ce qui a déjà été entrepris. C’est dur à croire le nombre de mesures qui sont déjà en chantier. Voyez par vous-mêmes…

Côté environnement, ça bouge au Québec.

Dès le premier budget, en mars 2019, le gouvernement annonce des investissements de 1,3 milliard de dollars qui serviront tant pour encourager le transport durable (dont la prolongation du programme Roulez vert) que pour accompagner les entreprises dans leur transition énergétique ou décontaminer  des terrains stratégiques ou encore pour moderniser des centres de tri. C’est là aussi où j’ai appris qu’avec « une production moyenne de 9,6 tonnes de CO2  par habitant, le Québec se situe bien en deçà de la moyenne canadienne qui est de 19,4 tonnes par habitant ».

Des actions concrètes

En avril 2019, pour prévenir les déversements illégaux de sols contaminés, le gouvernement lance un projet de règlement pour imposer la traçabilité de tous les mouvements de sols contaminés excavés au Québec, du lieu d’excavation au lieu de réception. La raison? Mettre fin aux déversements illégaux de sols contaminés qui polluent le territoire depuis des années. Il paraîtrait même, selon les médias, que la mafia et les Hells seraient impliqués dans l’affaire.

En juin 2019, le gouvernement annonce la création de cinq groupes de travail qui l’aideront à l’élaboration de son Plan d’électrification et de changements climatiques, qui devait être présenté au début 2020. Ce plan vise cinq choses : l’électrification de l’économie, l’efficacité énergétique, la mobilité durable, l’aménagement du territoire et l’adaptation aux changements climatiques. Personnellement, je trouve ça intelligent de partir de notre force : l’hydro-électricité. (Mon oncle Bertrand aussi, « parce que ça fait 75 ans qu’on est des experts mondiaux en la matière ».) Et parallèlement aux groupes de travail, le gouvernement a aussi entrepris une tournée spéciale des régions pour écouter les actions et les solutions des acteurs régionaux pour réduire les GES.

En octobre 2019, le gouvernement propose un projet de loi qui met fin au Fonds vert, en créant un Fonds d’électrification et de changements climatiques, fonds qui sera « entièrement consacré à la lutte contre les changement climatiques et l’électrification de l’économie ». Ça va faire changement du gaspillage de fonds publics sur plein de projets qui n’ont rien à voir avec les changements climatiques.

Chaque petit geste compte

Mais ce qui m’a étonné encore plus, en poussant ma recherche, c’est que le gouvernement a compris ce que la plupart des gens ont compris aussi : chaque petit geste compte. Et c’est dans cet esprit qu’en novembre 2019, le gouvernement a annoncé un nouveau règlement pour accélérer la récupération et la valorisation des gros électroménagers en fin de vie. Mine de rien, cette mesure va permettre une baisse de 200 000 tonnes de GES par année, selon ce que j’ai lu. Ce qui équivaut à des émissions annuelles de 60 000 voitures. Avant ça, quand notre frigo était fini, il s’en allait direct au dépotoir, sans être recyclé.

Toujours en novembre 2019, le gouvernement dépose un projet de loi pour accroître son réseau d’aires protégées et assurer, une fois pour toutes, la protection de l’intégralité de l’île d’Anticosti. Ce qui aidera grandement la candidature de l’île à tire de site du patrimoine mondial de l’UNESCO. Honnêtement, il était temps qu’on s’en occupe, et qu’un gouvernement décide de respecter les engagements internationaux.

Et le 30 janvier 2020, le jour même où l’OMS déclarait l’urgence sanitaire internationale face à la Covid-19, le gouvernement créait une « révolution » en confirmant l’élargissement de la consigne à tous les contenants de 100 ml à 2 litres, qu’ils soient en plastique, en verre ou en métal, incluant les bouteilles de vins et de spiritueux. Ça, ça veut dire qu’on va enfin pouvoir recycler nos bouteilles de la SAQ (au grand plaisir de mon oncle Bertrand qui, il faut le dire, aime beaucoup la SAQ). Et ça veut surtout dire qu’on va pouvoir recycler plusieurs milliards supplémentaires de bouteilles de plastiques et autres contenants.

À nous aussi de faire notre part

J’aurais pu continuer à vous faire la liste de toutes les mesures entreprises par le gouvernement depuis son élection, mais je pense que c’est aussi à chacun d’entre nous de faire sa part.

J’étais à la grande marche pour le climat, le 27 septembre 2019. J’étais une des 500 000 personnes qui ont manifesté tant leur amour de la planète que l’urgence d’en prendre grand soin. Mais je vous avouerai que j’en suis sorti perplexe aussi. Chaque fois que je voyais quelqu’un jeter un papier par terre, un gobelet de café ou une bouteille vide en plastique, je me disais que ça ne servait à rien de demander qu’on en prenne soin si ça ne nous dérangeait pas de la salir. (Mon oncle dirait « Il faut que les bottines suivent les babines. ») Bien sûr, j’ai vu aussi des gens avec leurs sacs à poubelle, qui ramassaient les déchets des autres pour être cohérents avec eux-mêmes. Mais je me suis demandé si, en ramassant les déchets des autres, ils ne participaient pas plutôt à masquer leur hypocrisie.

Les donneurs de leçons

Le Québec, comme le reste de la planète, je présume, compte son lot de donneurs de leçons. Mais je pense qu’ils devraient, eux aussi, prendre le temps de se regarder dans le miroir. Pourquoi? Tout simplement parce que j’ai beaucoup de misère à gober les paroles de quelqu’un qui veut changer le monde alors qu’il possède une maison de campagne sur le bord du fleuve ou directement sur les pentes de ski. Je trouve ça pas très crédible qu’on me dise de faire attention et – pire! – qu’on me fasse la morale quand on a deux voitures et deux maisons; et qu’on emballe les restes de son tartare dans du coton ciré pour être écolo.

Et pour illustrer ce que j’avance, permettez-moi de vous citer un article qui m’avait sidéré quand je l’ai lu en février 2019. Cet article est paru dans Le Monde diplomatique, et s’intitule La Caste au pouvoir. On y apprend non sans surprise que le président français, Emmanuel Macron, s’était entouré du premier « gouvernement de riches », avec pas moins de quinze ministres et secrétaires d’État millionnaires sur trente-deux; dont le fameux ministre de la Transition écologique et solidaire de l’époque, Nicolas Hulot, qui possédait pour plusieurs millions de biens immobiliers en Corse, en Savoie et dans les Côtes-d’Armor, en plus de posséder « six voitures, un bateau, une moto et un scooter… électrique ».

Comme quoi même les bottines de celui que tout le monde considérait comme grand écologiste ne suivent pas nécessairement ses babines. Ou que mieux vaut regarder ce qu’ils font que d’écouter ce qu’ils disent.

C’est pour cela que je préfère m’en tenir aux faits.

Et le fait est que ma blonde m’attend depuis une demi-heure pour souper.

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